Dans un entretien accordé à 7SUR7.CD le mercredi 18 novembre 2020, Patrick Nkanga, porte-parole du bureau politique du Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD) est revenu sur les dossiers qui défrayent actuellement la chronique en République démocratique du Congo. Il s’agit notamment de la crise au sein de la coalition FCC-CACH et la saisine du Conseil d’État par le député national Fabrice Albert Puela contre le bureau de l’Assemblée nationale.
Sur entre autre la fin de la coalition FCC-CACH déclarée par Jean-Marc Kabund, président a.i de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), dimanche à Kikwit, dans la province du Kwilu, il affirme que ce discours n’a aucune portée substantielle.
Ce membre du Front Commun pour le Congo (FCC) s’est exprimé aussi sur les relations entre Joseph Kabila et Félix Tshisekedi, respectivement ancien et actuel président de la RDC, tendues suite à la crise politique. À ce sujet, Patrick Nkanga indique que le lien entre les deux personnalités va au-delà des considérations politiques. Les deux, étant ancien et actuels chefs de l’État du Congo-Kinshasa, sont contraints de se parler, estime-t-il.
Ci-dessous l’intégralité de l’interview de Patrick Nkanga
7SUR7.CD : Quel avenir de la coalition FCC – CACH ? La rupture enclenchée est elle irréversible, car l’on entend que des faucons de deux camps se rentrent dedans ?
P.N : La rupture enclenchée par quel acte ? Nous entendons des discours, nous voyons des meetings militants. Mais qui n’ont aucune portée substantielle par rapport à la fin de la coalition. La coalition gouvernementale fût mise en place pour que nous gérions le pays ensemble, en dépit de la configuration post-électorale. Si nos partenaires font le choix de laisser le FCC gérer le pays seul, ce sera leur choix. Nous avons été de bonne foi et nous le sommes toujours. Les divergences même au sein d’une famille biologique ne manquent pas, mais si à chaque divergence, il faut que nos partenaires agitent les épouvantails de divorce, comme si ce fût un mariage forcé. Libre à eux. L’essentiel, c’est la gouvernance de l’État qui doit se mener avec sérénité. Les attitudes partisanes altèrent le bon fonctionnement de la gouvernance étatique et nous retardent quant à nos objectifs de développement. Nous devons nous refocaliser sur ce qui est essentiel pour le bien de nos concitoyens.
7SUR7.CD : Dans l’hypothèse de la fin de coalition gouvernementale, une nouvelle majorité doit être identifiée par un informateur désigné par le président de la République ?
P.N : Nommer un informateur postérieurement à l’investiture du gouvernement serait une incongruité juridique et une inconstitutionnalité de plus. L’article 78 alinéa premier de la constitution ne fait aucunement obligation au président de la République de nommer un informateur, avant de nommer le premier ministre. La mission d’information n’est prévue que dans le cadre de l’alinéa 2, si une majorité parlementaire n’est pas perceptible par le président de la République, au travers ses moyens discrétionnaires. Nommer un informateur en ce moment, alors qu’il existe un gouvernement en plein exercice qui jouit de la pleine confiance de la majorité parlementaire, réitérée lors du vote du projet de loi des finances pour l’exercice 2021, aura un mérite, celui de semer une confusion institutionnelle et fonctionnelle. Et dans l’hypothèse de la fin de la coalition, la conséquence directe et logique serait que le CACH quitte le gouvernement. La majorité parlementaire existe. L’ordonnance du président de la République nommant le premier ministre l’a clairement située. Néanmoins, nous avons lu la réaction de l’UNC (Union pour la Nation Congolaise), membre du CACH (Cap pour le Changement), qui n’approuve pas les propos tenus par Kabund. C’est dire que les vues sont encore divergentes et je suis convaincu que les vues porteuses de sagesse, même silencieuses, sont celles qui sont majoritaires.
7SUR7.CD : L’avenir du bureau de l’Assemblée nationale se joue au Conseil d’Etat. Vous redoutez une décision de lui sur la déchéance du bureau Mabunda pour défaut de rapport financier lors de la session de mars ?
P.N : La démocratie, c’est la séparation des pouvoirs. Si les élus du peuple, doivent voir les actes relevant de leur institution être soumis intempestivement au niveau du pouvoir judiciaire, nous sommes en train de desarticuler l’esprit et la lettre de la constitution du 18 février 2006, dans ce cas elle ne vaudrait plus rien, déchirons la et rédigeons une nouvelle constitution.
7SUR7.CD : Tshala Muana a été interpellée par les services de sécurité après une chanson pamphlétaire réputée contre le président Tshisekedi. Son interpellation vous inspire quoi ?
P.N : Interpellée une artiste pour ce que les gens pensent et non pour ce qu’elle a dit, est rationnellement difficile à comprendre. L’essentiel, elle est libre. Nous rendons grâce à Dieu. C’est une des ambassadrices de notre culture. Elle mérite le respect, la protection de la nation.
7SUR7.CD : Ne pensez-vous pas que vous avez poussé Tshisekedi à bout en lui mettant des bâtons dans les roues. Assumez-vous la responsabilité de la crise politique actuelle ?
P.N : J’aurais tant voulu que vous énumériez les faits. Les meilleurs ministres de son gouvernement qui exécutent avec assiduité le programme du gouvernement, définit de concert avec le président de la République, sont pour la plupart du FCC. L’un des projets qui tient à cœur le président de la République ; la gratuité de l’enseignement, est matérialisé de la manière la plus passionnée par le ministre Bakonga qui est du PPRD et le secrétaire permanent adjoint. Comment et par quels actes le FCC peut-il bloquer le président ? Et-il est important de préciser une chose, que la gestion quotidienne du pays n’incombe pas au président de la République mais plutôt au gouvernement de la République. Le gouvernement se bloquerait-il lui-même, à quelle fin ? La population n’est pas dupe. Elle sait que le premier ministre est du FCC ainsi que la majorité des ministres. Nous ne pouvons pas jouer à un jeu suicidaire.
7SUR7.CD : Un tête-à-tête Tshisekedi-Kabila est-il encore possible ? La confiance étant rompue, les deux personnalités peuvent-elles encore se reparler, se faire confiance et travailler à nouveau ensemble sans s’affronter dans les institutions ?
P.N ; Au-delà de toute chose, le lien inébranlable qui lie le président Félix Tshisekedi au président Kabila, c’est la fonction présidentielle. L’un a été président de la République et l’autre l’est actuellement, ce lien va au-delà de toutes considérations politiques et les contraint à se parler ad vitam æternam. Maintenant, s’agissant de l’ossature institutionnelle qui nous a emmené à opter pour la coalition gouvernementale en lieu et place de la cohabitation, il ne faut rien exclure entre les deux hautes personnalités qui ont dans leurs veines, la passion du Congo.
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