RVA, cette mine d’or qui ne profite pas à l’État

Le Directeur général de la RVA (Régie des Voies Aériennes), Bilenge Abdallah, séjourne à la Prison Centrale de Makala depuis le mardi 10 novembre 2020. Placé sous mandat d’arrêt provisoire par le Parquet général près la Cour d’Appel de Kinshasa/Gombe, il est retenu à sa charge, comme grief principal, le détournement présumé de plus de 15 millions de dollars représentant des indemnités de sortie des cadres et agents mis à la retraite, non versés depuis 2014 à la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS). Selon des sources proches de cette entreprise publique, il pourrait également être rattrapé par le dossier du « Go pass », dont les recettes sont gérées dans la plus grande opacité.

Les mêmes sources indiquent que les retenues des cotisations sociales et les fonds collectés sous la rubrique «taxe spéciale d’embarquement pour passager baptisée» « Go pass » ne seraient que le bout de l’iceberg. La RVA, soutiennent-elles, est une mine d’or cachée qui génère, mensuellement, des millions de francs congolais, de dollars et d’euros, également cachés, lesquels disparaissent, depuis des décennies, sans laisser de traces. A les en croire, la Régie des Voies Aériennes n’aurait rien à envier, en termes de recettes, aux régies financières officiellement connues, à savoir la DGDA (Direction Générale des Douanes et Accises), la DGI (Direction Générale des Impôts) et la DGRAD (Direction Générale des Recettes Administratives, Domaniales et de Participation).

Elles en appellent ainsi à des investigations sérieuses et poussées de l’IGF (Inspection Générale des Finances) et de la Police Judiciaire des Parquets dans les états financiers, depuis le règne de l’ancien PDG (Président Délégué Général) Kikunda Ombala par exemple, signataire en 1991 d’un document portant nomenclature des taxes aéronautiques et extra-aéronautiques, pour se faire une idée des millions de devises parties en fumées.

Selon la décision n°RVA/DG/12.00/00477/91 du 1er novembre 1991, encore en vigueur, les tarifs des redevances aéronautiques et extra-aéronautiques concernent l’atterrissage, le balisage lumineux, le stationnement sur les aires de trafic, l’embarquement des passagers, le fret, le survol ou la « route », l’accès aux zones réservées, l’occupation des immeubles et terrains, l’exploitation des bars, restaurants, boutiques et autres, l’occupation des locaux destinés aux bureaux, les entrepôts, le stationnement des véhicules, etc.

De la taxe d’atterrissage

La taxe d’atterrissage est calculée selon le poids maximum de l’aéronef au décollage. Ainsi donc, la taxe applicable aux aéronefs, de zéro à 25 tonnes est de 1,6 dollars américain la tonne. Entre et 26 et 75 tonnes, la RVA fait payer 3,2 dollars américains la tonne. Au-delà de 75 tonnes, le tarif à payer est de 4,4 dollars américains la tonne. Un aéroport de la catégorie de NDjili, qui reçoit chaque jour de gros porteurs pesant au-delà de 300 tonnes – cas des Airbus A320 ou Boeing 747 – fait entrer dans les caisses de cette société de plantureuses recettes.

De la taxe de balisage lumineux

Une autre taxe est exigée aux aéronefs lors des atterrissages et décollages nocturnes mais aussi quelques fois diurnes en cas de mauvais temps. Un balisage simple revient à 249 dollars américains. Le balisage de catégorie I est facturé 260 dollars américains et celui de catégorie II 300 dollars américains.

De la taxe de stationnement

Selon les directives de l’OACI (Organisation de l’Aviation Civile Internationale), tout aéronef est assujetti à la taxe de stationnement sur une aire de trafic, dans un hangar de maintenance, un hangar technique ou une zone d’entretien. Elle est calculée par heure et par tonnage. Elle s’élève à 0,2 dollar américain par heure et par tonne sur le tarmac et à 0,12 dollar américain par heure et par tonnage dans la zone d’entretien. Cette taxe est payée mensuellement par les compagnies aériennes agréées par la RVA. Les aéronefs appartenant à des firmes non agréées par la RVA sont tenus de la libérer avant le décollage. Mais tout paiement trimestriel ou annuel est soumis à la signature préalable d’un contrat ou d’une convention avec la Régie des Voies Aériennes.

De la taxe d’embarquement

Hormis le « Go pass », qui est une taxe spéciale instaurée par la RVA pour l’embarquement des passagers, il existe une autre taxe, classique et traditionnelle, que les compagnies aériennes intègrent d’office dans les titres de voyage, au profit de la même RVA. Le versement des fonds s’effectue au quotidien. Tout paiement non quotidien doit faire l’objet d’un contrat. Le taux applicable est de 6 dollars américains par passager âgé de 0 à 12 ans (bébé ou enfant compris) et de 8 dollars américains par passager âgé de 12 ans et plus.

Taxe de survol ou de route

Les aéronefs qui se présentent dans l’espace aérien de la République Démocratique du Congo en phase d’atterrissage, payent une taxe de survol ou de route, exigée suite à l’assistance de la RVA en termes de recours aux instruments d’aide à la navigation aérienne. La somme à payer est déterminée en fonction d’une part, de la masse maximale de l’aéronef autorisée au décollage et, d’autre part, de la distance parcourue.

Les aéronefs qui traversent purement et simplement l’espace aérien congolais, vers d’autres destinations, sont également soumis à cette taxe, dont la collecte est confiée à l’OACI. Les experts du secteur signalent que c’est l’une des principales ressources de la RVA, qui devraient être affectées, en priorité, à la modernisation et à l’entretien des équipements d’aide à la navigation aérienne et d’assistance au sol (véhicules anti-incendie). Il se fait malheureusement que depuis des décennies, ces fonds sont systématiquement pillés par des mandataires et ministres de tutelle, sous prétexte de leur affectation à la rémunération du personnel.

Les mêmes experts persistent et signent que la RVA engrange suffisamment de recettes susceptibles de lui permettre de payer son personnel, de dégager des frais de fonctionnement et de verser des dividendes au Trésor public sans puiser dans ses comptes à l’étranger où sont régulièrement transférées les recettes de survol.

De l’occupation des immeubles et terrains

Les taux d’occupation des immeubles et terrains varient selon la nature des surfaces mises à disposition et les réalités du secteur locatif local. L’exploitation d’un bar ou d’un restaurant…dans les installations d’un aéroport international est taxée à 380 dollars américains par mois ; dans un aéroport national de première classe à 253 dollars américains par mois ; dans un aéroport national de 2me classe à 190 dollars américains par mois ; et dans un aérodrome à 125 dollars américains par mois.

Le loyer mensuel pour un bureau dans un aéroport international revient à 4 dollars américains pour un mètre carré ; pour un entrepôt à 2 dollars américains le mètre carré ; pour un hangar à 1,5 dollars américains le mètre carré ; pour une boutique sous-douane à 237 dollars américains le mois et une boutique en zone publique à 164 dollars américains le mois.

Taxe d’accès aux zones réservées

L’accès aux parkings est payant, par heure, pour les taxis comme pour les véhicules des particuliers. S’agissant des agents (personnel technique, agents comptoirs, hôtesses d’accueil) des compagnies aériennes nationales, ils sont tenus d’acquérir à 11 dollars un badge valide pour une année. Ceux des compagnies aériennes internationales sont appelés à débourser 50 dollars pour un badge valable pour la même périodicité.

Les chargés de protocole des sociétés privées et paraétatiques, des institutions publiques et des ambassades paient 102 dollars américains pour un laissez-passer valable pour une année.

RVA « canard » boiteux ? Non, non et non !

La conclusion à tirer de cet étalage des sources d’entrée des recettes en devises fortes pour la Régie des Voies Aériennes est que celle-ci ne peut, à aucun moment, être versée dans la corbeille des « canards boiteux » du Portefeuille de l’Etat. Par conséquent, tous les mandataires ou ministres qui tentent de faire croire à l’opinion nationale que cette entreprise publique souffrirait des difficultés de trésorerie ne jouent pas franc jeu. D’où la nécessité d’un audit exhaustif pour lever les cadavres qui dorment dans les placards.

Lephareonline.net/Acturdc.com

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