« Est de la RDC et les luttes d’influences dans la région des grands lacs », (tribune)

Est de la RDC et les luttes d’influences dans la région des grands lacs

La RDC fait face à des multiples humiliations, des massacres, pillages et violation de son territoire perpétré par ses voisins qui agissent soit de manière directe, soit par sous-traitance des groupes armés. Cette situation perdure depuis 1997 avec la chute de Maréchal Mobutu. Le caractère répétitif de ces actes pousse certains Congolais à penser qu’il est temps de faire la guerre au Rwanda qui s’avère être le parrain de l’un des groupes terroristes qui endeuillent les peuples congolais. Dans cette perspective, sur base des considérations méthodiques et scientifiques de géopolitique, nous avons essayé de comprendre la situation à travers cette réflexion. Pour commencer, notons que la morphogenèse de la sous-région révèle qu’elle est porteuse de gènes conflictuels. En géopolitique on souligne le fait du déterminisme géographique. Cette région est composée de minuscules Etats qui tous entourent un énorme État doté des toutes les ressources naturelles dont un pays aspirant à la puissance a besoin. La sous-région est donc naturellement destinée à être constamment en guerre.

RÉFLEX GÉOPOLITIQUE DES ÉTATS DE LA SOUS-RÉGION

Il nous manque de l’espace vital, qui en dispose ?
Quel est son dispositif de force et vers qui est-il tourné ?
De quel ordre est son dispositif de force ? défensif ou agressif ?
Quels sont ses ennemis et ses amis ? Pourquoi ?
Il me faut de l’autorité sur les voisins, que faire ?
Quelles sont leurs priorités ?
De qui obtiennent-ils de la force et pourquoi ? « L’ami de mes amis n’est pas mon ami, l’ennemi de mes ennemis est forcément mon ami ».
Kagame a su faire cette réflexion avec minutie. Il a donc réalisé le concert de toutes les ressources géostratégiques en s’appuyant sur les mouvements terroristes dont l’objectif est d’amener les adversaires à céder leurs positions et le pousser à faire ce qu’il ne ferait pas en tant de confiance. Étant en conflit avec Kampala, il n’a pas hésité de renouer avec Museveni, leurs différends ne sont rien comparés à leurs intérêts communs sur le sol Congolais.

P. Kagame est conscient des motivations géostratégiques de la sous-région. Il anticipe les enjeux en activant ses motivations idéologiques de la guerre au loin de son petit territoire et de la géostratégiques en termes d’influence économique et touristique. La rhétorique de la RDC qui consiste à dire « nous sommes prêts à défendre notre territoire national », relève de la défensive qui ne peut pas effrayer l’ennemi. Notons par ailleurs que le Rwanda n’agit pas en solo, le fait que certains Etats dont la France, des USA et des UK qui se montrent assez gentils envers le géant de Kigali , frise la complicité. Le feraient-ils en raison de protéger leurs importants investissements au Rwanda, ou pour soulager la culpabilité de leur passivité pendant les affres de 1994 ? Quoi qu’il en soit, la complicité est manifeste. Le plus paradoxal c’est que, ce sont ces Etats qui entraînent et équipent les FARDC. L’on peut bien comprendre que la compétence qu’ils transfèrent aux FARDC ne peut pas être offensive, mais simplement défensive. La prolongation de la résolution 1533 du Conseil de Sécurité sur demande de la France ne vient que renforcer le doute sur sa participation au complot contre le peuple Congolais. Cette disposition qui stipule que tout fourniture, vente ou transfert d’armes et autres matériels militaires en faveurs des forces de sécurité congolaises doit préalablement obtenir le quitus du CS , contraint la RDC à ne jamais s’équiper en dispositif offensif, car l’information préalable au Conseil de Sécurité signifie que la RDC n’a pas droit au secret défense sur le type et la composition de son arsenal logistique de sa défense.

ATTITUDE GEOSTRATEGIQUE QUE DOIT ADOPTER LE GOUVERNEMENT CONGOLAIS

On ne peut pas s’aventurer dans une guerre d’agression sans être sûr de nos ressources :
Diplomatiques ;
Humaines ;
Logistiques ;
Économiques etc.
Ressources diplomatiques
Tout Etat, comme tout groupe social, afin d’assurer le succès de ses objectifs, met en place un dispositif diplomatique, un dispositif de gestion de ses relations extérieures, c’est-à-dire un réseau hiérarchisé en général public et officiel, d’alliances et d’influences. Au réseau officiel de gestion d’alliances et d’influence s’ajoutent les réseaux officieux. Les ressources diplomatiques ici évoquées font allusions aux moyens de résolution des conflits ou de la capacité d’imposer sa volonté par d’autres voies que militaires. Ces moyens sont entre autres : La bonne collaboration avec les médias d’influence. Les grands groupes des médias sont devenus un grand outil d’influence dans les relations internationales. Le cas de l’Ukraine dans le conflit qui l’oppose à la Russie est très éloquent à cet effet. Malgré l’occupation de plus de 30 % du territoire Ukrainien par les forces Russes, et malgré les bonnes raisons que le Gouvernement Russe peut avoir pour justifier ce qu’ils appellent de simple opération, le narratif que développent les médias est de nature à faire passer le Gouvernement Russe de belliqueux et ennemi de l’humanité. Mais lorsque les gouvernements Américains, britannique et Français attaquèrent le régime de Mohamad El Kadhafi, le narratif fut de dire que c’était une intervention pour la sauvegarde de la démocratie. Et donc, avoir une bonne collaboration avec des médias influents est d’une grande importance dans les relations internationales. A ce jour, la RDC ne bénéficie pas du tout d’un appuie des grands groupes de médias comme TV5Monde, FRANCE24, BLOOMBERG, CNN etc. Alors que son adversaire direct est quant à lui l’enfant chéri de ces groupes médiatiques ; Bonne relation avec des grands groupes des lobbies tels que Fleishman-Hillard, Burson-Marsteller, Tony Blair Institute… Ces institutions sont devenues au fil du temps des acteurs des relations internationales du fait qu’elles ont un accès facile aux décideurs des grandes puissances du monde. D’ailleurs, la RFI dévoilait l’année dernière que le chef d’Etat Rwandais est abonné au cabinet de l’ancien Premier Ministre Britannique.

Parler des ressources diplomatiques, c’est parler du dispositif hiérarchisé des coopérations et d’influence avec ou dans les organisations internationales publiques ou privées. À ce jour sur ce point, la RDC est en retard par rapport à son adversaire direct que le Rwanda. Certains Congolais se demandent pourquoi Kinshasa privilégie le dialogue à la guerre, c’est parce que la diplomatie est l’outil des relations internationales le plus privilégié ; il est usité en amont et en aval dans les conflits internationaux. Dans le monde multilatéral, la guerre n’est qu’un ultime recours des relations internationales marqué par la cessation des moyens diplomatiques. Et même pendant la guerre, il y a continuation des négociations sous forme secrète. Il est donc important pour la RDC d’avoir des ressources capables de bien plaider sa cause auprès des puissants du monde.

Les ressources humaines
Quel est l’effectif du personnel de guerre ? Les FARDC comptent combien d’éléments ? Sont-ils en mesure d’assurer la protection des frontières avec l’Ouganda, le Burundi, l’Angola, la Tanzanie, la Zambie et la Centrafrique au même moment que nous allons agresser le Rwanda ? car tous ces pays nourrissent les mêmes appétits que le Rwanda sur le Congo.

Ressources logistiques
Répondre à la question des ressources logistiques en lutte d’influences, c’est être en mesure de démontrer la capacité de déployer son arsenal militaire le plus rapidement possible dans une zone, et la capacité d’évacuer les blessés de guerre. Répondre à cette question, c’est aussi démontrer la capacité d’étouffer une menace à son origine avec promptitude. A ce jour, la RDC n’a pas toutes ces capacités. Quelle est la capacité de la flotte aérienne et maritime des FARDC ? en cas de rupture de stock, quelle ressource utiliser pour se ravitailler en matériels de guerre ?
Ressources économiques et financière
Le Rwanda a ses parrains occidentaux qui peuvent clouer le Congo sous sanctions à la première semaine d’agression. Les sanctions provoquant les grognes sociales, les autorités seront aussitôt fragilisées à l’interne et externe, ce qui rendra le Congo plus fragile qu’il ne l’est déjà avec son économie extravertie dont les exportations annuelles s’élèvent à presque trois milliards de dollars. Les réserves de change ne sont que d’ordre de trois à quatre mois. Mener une guerre d’agression contre le Rwanda impliquerait la fermeture des frontières non seulement avec le Rwanda mais aussi celles d’avec l’Ouganda.

PERSPECTIVES GEOPOLITIQUES ENVISAGEABLES POUR LA RDC

Réaffirmons ici que la RDC, au vue de sa physionomie géographique, est un pays avec une vocation militaire. Si aujourd’hui les agressions enregistrées ont pour objectif de piller les ressources minérales, presque tous les geéopolitistes prospectivistes sont d’accord sur les agressions du futur qui tourneront autour des plusieurs autres ressources dont la RDC est détentrice. C’est notamment l’eau, la faune et la flore. Si l’armée congolaise n’est pas prête pour ces enjeux, la RDC jouera encore le rôle lui attribué par les conférenciers de Berlin du, un simple champ du monde dans lequel quiconque aurait la force d’y venir cueillir les fruits serait le bienvenu. La RDC a été victime dans toutes les trois révolutions enregistrées jusqu’ici par le monde à savoir : la révolution du caoutchouc, industrielle et celle des NTIC. Si rien n’est fait, elle sera encore victime de la révolution de l’eau. Pour qu’elle ne soit pas une simple victime des enjeux géopolitiques du futur, la RDC se doit de développer son arsenal de guerre en ressources humaines, matériel, financier et technologiques.

Les effectifs actuels du personnel de guerre
Selon l’ATLASOCIO.COM de 2014 à 2022 l’effectif des FARDC a évolué d’environ 12,66% soit un effectif de 134250 en 2014 et 151251 en 2022. Pour un pays de 345410 km envahi par une soixantaine de groupes armés. Le gouvernement Congolais doit recruter au moins 900.000 hommes supplémentaires pour être en mesure non seulement d’affecter au moins 100.000 hommes à la protection de chaque frontière avec ses neuf voisins, mais aussi avoir un effectif capable de lancer une offensive d’agression. Les neufs pays voisins à savoir l’Angola, Burundi, Tanzanie, le Soudan, l’ouganda, le Rwanda, la Zambie, le Congo, le Centrafrique ; comptent respectivement : 117000 hommes,51050 hommes,108400 hommes,209300 hommes,56400 hommes, 35000 hommes,19500 hommes, 12000 hommes,10150 hommes.
L’Egypte qui ne figure même pas dans le top10 des Etats africains le plus grands en superficie compte plus de 1314500 hommes, réservistes et actifs. Notons par ailleurs que l’Egypte n’a que 100.600.000 habitants, alors que la population congolaise est estimée à 100 .000.000. Comprenons donc que l’armée a été négligée tant par les différents gouvernements que par le peuple Congolais lui-même. L’heure a sonné pour rendre obligatoire le service militaire.

Ressources matérielles
Le gouvernement congolais se doit de consentir des efforts pour faire lever l’embargo partiel imposé sur les FARDC, et solliciter des partenariats avec des puissances qui n’ont pas des intérêts directs avec le Rwanda et l’Ouganda qui sont des adversaires directs. Les options pour se procurer du matériel de la dernière génération peuvent être celles d’aller directement vers les fournisseurs ou de passer par des entremetteurs comme l’Egypte par exemple, elle qui a eu le privilège d’acquérir les rafales Français.

Ressources financières
Les forces armées doivent être attractives pour espérer recruter des hommes de qualité. L’attraction passe par le bon traitement salarial des soldats de rang et des officiers. Devant les officiers supérieurs des FARDC, le Président Tshisekedi avait fait savoir que depuis que le Congo indépendant existe, les FARDC n’ont jamais été aussi bien financés que cette année 2022. Mais le problème se pose dans la gestion de ces financements. Les FARDC doivent donc développer la rigueur dans la gestion financière pour ne pas avoir des aigris dans ses rangs, et attirer les jeunes à intégrer l’amé

Conclusion
Pour conclure, réaffirmons que la République démocratique du Congo est un État destiné militaire, c’est ce que nous avons essayé de dire dans ce texte. Nous avons démontré que la région de grand-lac est une région naturellement conflictuelle, les Etats sont condamnés à se faire la guerre pour des enjeux territoriaux, commerciaux, économiques ou encore de leadership politique. Si la RDC ne reconsidère pas ses ressources diplomatiques, et si elle ne réforme pas ses forces armées, les dix prochaines années risquent d’être pire que les vingt dernières années.

Analyse de Kong Mbambu Jean-Luc/Politologue

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