RDC: Tshisekedi dans le piège de la force militaire régionale

Les dirigeants de l’Afrique de l’Est ont décidé à Nairobi l’envoi d’une force régionale pour tenter de mettre fin au conflit dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC). Une stratégie qui est accueillie avec méfiance au Congo, alors que le Rwanda est accusé de soutenir les rebelles du M23 et que l’Ouganda semble jouer trouble jeu.

C’est une situation bien inconfortable dans laquelle se retrouve Félix Tshisekedi. Depuis maintenant 3 mois, le président congolais assiste quasi-impuissant à l’avancée des rebelles du M23, qui prennent petit à petit le contrôle de villages du Rutshuru (Nord-Kivu), jusqu’à s’emparer récemment de la ville de Bunagana, frontière avec l’Ouganda. Déjà en lutte contre la centaine de groupes armés qui pullule dans la région, l’armée congolaise peine à contenir le M23 que Kinshasa accuse d’être soutenu, en hommes et en armes, par le Rwanda voisin. La situation dans la région devient explosive. Deux soldats rwandais sont capturés sur le sol congolais, validant ainsi la thèse du soutien du Rwanda au M23, et Kigali accuse l’armée congolaise d’avoir tiré deux roquettes sur son territoire. Tshisekedi a clairement haussé le ton en affirmant faire face à « une attaque du Rwanda », sous couvert du M23, « qui cherche à occuper notre terre riche en or, coltan et cobalt pour l’exploiter pour son propre profit ». Des allégations réfutées par Kigali, qui accuse en retour l’armée congolaise de collaborer avec les FDLR, une rébellion rwandaise en lutte contre le pouvoir de Kigali.Le Rwanda et Ouganda au coeur d’un chaos sécuritaire

Le problème, c’est que ces accusations mutuelles durent maintenant depuis plus de 20 ans et que la situation dans l’Est du Congo ne s’est pas améliorée depuis. En cause, la faiblesse d’un Etat corrompu, largement absent dans l’Est du pays, et des militaires sous-payés, mal équipés et corrompus également, qui ne parviennent pas à éradiquer les groupes armés instrumentalisés par les élites congolaises et par certains pays de la région. Par-dessus ce capharnaüm sécuritaire congolais, se rajoute les relations tumultueuses entre les deux voisins les plus puissants de la région : le Rwanda et l’Ouganda. Les deux pays se sont d’ailleurs affrontés en terre congolaise dans les années 2000. 20 ans plus tard, Kigali et Kampala cherchent toujours à contrôler leurs zones d’influence dans les Kivu et en Ituri. Pour des raisons économiques : les deux voisins se servent allègrement en or, coltan, bois et pétrole au Congo, et pour des raisons sécuritaires afin de maintenir à distance les groupes armés qui leur sont hostiles et entretenir un chaos bien utile pour exporter en toute illégalité les richesses du sous-sol congolais.

L’intervention ougandaise qui énerve Kigali

Le retour du M23 sur le théâtre militaire, après 10 ans d’une relative discrétion, est sans doute à mettre au crédit de ces relations extrêmement tendues qu’entretiennent le Rwanda et l’Ouganda. Toujours à couteaux tirés, les deux frères ennemis règlent souvent leurs comptes sur le dos du Congo voisin. En autorisant l’entrée des troupes ougandaises sur le territoire congolais fin 2021 pour lutter contre les rebelles ADF, Félix Tshisekedi ne se doutait pas que cette décision irriterait profondément Kigali. Hasard du calendrier, le retour du M23 coïncide, à quelques semaines près, avec l’arrivée des soldats ougandais. De manière assez cynique, les troupes de Kampala, ont d’abord commencé leurs opérations en remettant en état les voies de communication dans la région, permettant certes les militaires de progresser plus facilement dans la région, mais permettant aussi les commerces plus ou mieux licites de se développer. D’ailleurs, le bilan des opérations militaires conjointes avec l’armée ougandaises est bien maigre, puisque les massacres des rebelles ougandais ADF se poursuivent et que leur zone d’influence s’est étendue.Une nouvelle entente Kampala-Kigali

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