RDC : La nationalité, une question légale

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Comme si les Congolais n’avait pas d’autres préoccupations existentielles et plus susceptibles de requérir une attention plus soutenue des autorités, ils sont, une fois de plus, sollicités à participer à un débat inutile et sans impact sur la vie quotidienne. Est-il pertinent, aujourd’hui, de débattre d’une question liée à la nationalité d’un candidat à la présidence de la République ?  Pourquoi ? Serait-ce, comme le pense et le déclare une bonne frange de l’opinion publique, une action politicienne tendant à éliminer d’avance de potentiels candidats à la présidence ? Il serait alors très malsain d’agir de la sorte.

Ne faudrait-il pas continuer à respecter et à observer les limites actuelles du droit, des lois et de la justice, tant les interpellations et autres diatribes passionnées et rageuses exigeant des changements et qui puisent leurs argumentations ailleurs risquent de conduire notre nation vers sa dislocation. Il suffit de lire certains messages lancés sur les réseaux sociaux pour se rendre compte du danger.

Il y a eu plusieurs textes juridiques qui ont défini et organisé la nationalité en territoire congolais. J’en ai personnellement trouvé neuf :

1.     Le décret du 27 décembre 1892 ;

2.     L’arrêté du Secrétaire d’Etat du 09 mars 1901 relatif à la naturalisation ;

3.     Le décret du Roi Souverain du 21 juin 1904 relatif à la naturalisation des indigènes congolais ;

4.     Le décret-loi du 13 mars 1965 relatif à la déclaration acquisitive de la nationalité congolaise ;

5.     Le décret-loi du 18 septembre 1965 portant loi organique relative à la nationalité congolaise ;

6.     Ordonnance-loi n° 71-020 du 26 mars 1971 relative à l’acquisition de la nationalité congolaise par les personnes originaires du Rwanda-Urundi établies au Congo 30 juin 1960 ;

7.     La loi n° 72-002 du 5 janvier 1972 relative à la nationalité zaïroise (congolaise aujourd’hui) ;

8.     Le décret-loi n° 197 modifiant et complétant la loi n° 81-002 du 29 juin 1981 sur la Nationalité Congolaise ;

9.     La loi n° 04/024 du 12 novembre 2004 relative à la nationalité congolaise ;

Ce rappel historique démontre combien l’évolution de la législation liée à la nationalité a été chaotique dans notre pays.

Dans les débats, il a été évoqué notamment l’Ordonnance-loi n° 71-020 du 26 mars 1971. C’est celle qui avait accordé la nationalité congolaise aux personnes originaires du Rwanda-Urundi établies au Congo 30 juin 1960. Le texte que le Lieutenant-Général J.D. MOBUTU avait signé en un article unique stipulait : « Les personnes originaires du Rwanda-Urundi établies au Congo à la date du 30 juin 1960 sont réputées avoir acquis la nationalité congolaise à la date susdite. »

Mais ce texte qui ne concernait que les originaires du Rwanda-Urundi avait un caractère trop personnel et particulier. C’est sans doute l’incapacité d’appliquer cette loi à toutes les autres populations se trouvant dans la même situation que les rwandophones qui poussa le législateur à l’annuler pour la remplacer une année après par la loi de 1972. L’article 47 de cette dernière loi affirme que : « L’ordonnance loi n° 71-020 du 26 mars 1971 est nulle et non avenue. Toutes les dispositions législatives antérieures contraires à la présente loi sont annulées. »

Cependant la loi de 1972 sera à son tour abrogée par celle de 1981 dont l’accouchement causa tant de dissensions qui ébranlèrent la Conférence Nationale Souveraine. Certains analystes affirmèrent même que cette loi de 1981 fut à l’origine de la guerre dite de « banyamulenge » avant d’être baptisée guerre de libération.

On se rappellera que lors de la Conférence Nationale Souveraine, des analyses de la commission affirmaient qu’en matière d’attribution, « … Depuis la Constitution de 1964, jusqu’à la loi de 1981, un seul critère principal avait été dégagé et maintenu en permanence, comme racine pivotante, d’année en année : l’établissement effectif, depuis l’Etat Indépendant du Congo (19885-1908), d’une tribu ou d’une partie de tribus sur le sol congolais. » C’est donc cette présence physique et organique (établissement à une période historique donnée) qui est prise en considération. Mais là se posait alors la question de savoir comment faire la différence entre les terminologies populations « transplantées » et populations « établies » ?

Aujourd’hui, aucune nouvelle loi ne régit la nationalité si ce n’est la loi n° 04/024 du 12 novembre 2004 relative à la nationalité congolaise. Elle a été prise en exécution de l’article 14 de la Constitution de la Transition.

Elle se caractérise par les principes ci-après :

1.     L’institution de deux statuts juridiques distincts : la nationalité congolaise d’origine et la nationalité congolaise d’acquisition ;

2.     L’unicité et l’exclusivité. En effet, la nationalité congolaise ne peut être détenue concurremment avec une autre nationalité ;

3.     L’exigence du bénéfice de l’égalité des droits et de la protection aux termes de la loi en tant que citoyens de tous les groupes ethniques et nationalités dont les personnes et le territoire constituaient ce qui est devenu le Congo (présentement la République Démocratique du Congo) à l’indépendance ;

4.     La reconnaissance, l’acquisition, la perte et le recouvrement de la nationalité congolaise sont fixés par une loi organique.

Concernant l’acquisition de la nationalité congolaise par l’effet de la naissance et de la résidence en RDC, il est plus précisément stipulé que « Tout enfant né en RDC de parents étrangers peut, à partir de l’âge de 18 ans accomplis, acquérir la nationalité congolaise à condition qu’il en manifeste par écrit la volonté et qu’à cette date il justifie d’une résidence permanente en RDC. » (Article 21). Au regard de l’Arrêté ministériel n° 261/CAB/MIN/J/2006 du 4 juillet 2006 portant certaines mesures d’exécution de la loi n° 04/024 du 12 novembre 2004 relative à la nationalité congolaise, pour toute demande d’acquisition de la nationalité congolaise par l’effet de la résidence en RDC il faut produire certains documents.

Il faut donc observer que la filiation, la naturalisation, l’option et la présomption constituent les seuls modes légaux d’acquisition de la nationalité congolaise à l’exclusion de toute autre.

Au-delà des lois, il faudrait aussi jeter un regard rétrospectif sur l’histoire de ce pays. Ainsi, on se rendra compte que ce ne sont nullement nos ancêtres qui ont érigé la RDC en Etat-nation. Ce sont les puissances coloniales qui ont tracé les frontières de ce pays, nous séparant souvent de nos frères, de nos cousins, de nos oncles, bref, de nos parents se trouvant de l’autre coté de nos frontières. Alors, un peu d’humanisme et d’humilité dans l’examen de la question de la nationalité, à la place d’une arrogance nationaliste exacerbée, déplacée et injustifiée, ne ferait de mal à personne.

Ce rappel n’a pas la prétention d’être une analyse juridique. Je n’en ai pas l’expertise. C’est juste un appel pour que le débat sur la nationalité puisse se faire, si nécessité il y a et en temps opportun – notamment en ce qui concerne la double nationalité – sur le plan du droit, de la loi et de la justice. Une telle démarche nous épargnerait de coups de poignards qui sont donnés actuellement dans ce qui nous reste encore d’unité nationale.

Actualite.cd/acturdc.com

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