Il y a deux jours, Félix Tshisekedi vient de déclarer l’état de siège dans les provinces du Nord Kivu et de l’Ituri pour « mettre fin rapidement à la situation d’insécurité ». Au moment où j’écris cet article, je venais de parcourir en véhicule (en cinq jours), le tronçon Bunia-Goma, en passant par Beni et Butembo, et j’ai eu l’occasion d’échanger avec les populations de la région. Leur avis sur la situation sécuritaire et sur l’instauration de l’état de siège est unanime : le Président de la République nage toujours à contrecourant de ses populations. Lors de l’une de ces rencontres, à Butembo, un intervenant a dit : « Siku unarudiya Kinshasa, umuambiye Tshisekedi hakuna vita apa. Atoshe paka ba askari yake yote, Kongomani ya kueli na ya présumés, na ba uyu ya MONUSCO, atahona hakuna vita apa » (Quand tu rentres à Kinshasa, vas dire à Félix Tshisekedi qu’il n’y a pas de guerre ici. Qu’il remballe tout simplement tous ses militaires, Congolais et pseudo-Congolais, ainsi que la MONUSCO, et la paix reviendra d’elle-même).
Pourquoi l’état de siège ? Le Chef de l’État explique (TV 5 France) « Il s’est créé maintenant un groupe à tendance islamiste, au discours islamiste, et aux méthodes islamistes, qui sème la terreur auprès de nos populations ». Le problème c’est que lesdites populations qualifient cet argument de prétexte : « C’est seulement depuis quelques semaines que les États-Unis brandissent le spectre du terrorisme islamiste ; pourquoi ne pas parler, au moment de justifier l’état de siège, des véritables auteurs de l’insécurité, connus de tous et que Mamadou Ndala et Bahuma ont combattus ? »
Pourquoi l’état de siège alors que Mamadou Ndala et Bahuma ont mis en déroute la rébellion en peu de temps sans l’état d’urgence, avec le soutien des populations qui les ravitaillaient en nourriture et en renseignements ? Les victoires de ces deux héros nationaux avaient une recette simple : de vrais officiers congolais aux commandes et une coopération active avec les populations. Ces mêmes populations que les nouveaux stratèges autour de Tshisekedi préfèrent accuser d’intelligence avec leurs tueurs.
Pourquoi l’état de siège alors que les questions préalables telles que l’audit de l’armée et le départ de la MONUSCO, préalables proposés à l’examen par les organisations citoyennes, sont soigneusement évités ? L’état d’urgence est incompréhensible, sauf si on regarde du côté de … la MONUSCO.
En effet, on ne manquera pas de noter que cette grave décision survient juste dans la foulée des manifestations contre la MONUSCO. S’il y a quelqu’un que cette décision arrange, c’est bien elle. L’état de siège implique « une forte restriction des libertés fondamentales de l’État de droit », notamment la liberté de manifester. La MONUSCO a tout fait pour empêcher les manifestations, allant jusqu’à, selon certains, fomenter un conflit intercommunautaire (ce qui justifierait sa présence) entre les Nande et les Kumu, conflit dont plus personne ne parle aujourd’hui, puisqu’il n’a jamais existé.
Il n’y a aucune raison objective pour l’état d’urgence, car Mamadou Ndala et Bahuma n’en ont pas eu besoin pour mettre en déroute l’ennemi. Il faut plutôt soupçonner très fortement derrière les incohérences apparentes de notre Président la pression de la MONUSCO, qui l’oblige à déclarer dans le même discours que la MONUSCO est là pour nous aider, et à décréter un état d’urgence qui ne sert à rien et dont le seul but est d’empêcher les manifestations contre la MONUSCO. Cette réaction-panique montre que le peuple a bien touché là où ça fait mal, donc aucune raison de reculer, LA MONUSCO DOIT PARTIR. La semaine prochaine, les organisations de la société civile dont la CNA fait partie rendront publique une déclaration indiquant à la population l’attitude à prendre face à cet état de siège qui n’apporte pas de plus-value et la suite des activités pour le départ de la MONUSCO.
Serge Goncho, Président du Mouvement Citoyen dénommé Conscience nationale en action( CNA) qui milite la sécurité et la paix dans son programme Congo de l’Est à l’Ouest.
24h.CD/acturdc.com