Pourvu que cette mesure survive au combat contre la pandémie de coronavirus au pays.
Quelquefois, une infortune nous procure des avantages que nous n’aurions pas eus sans elle. C’est sans doute cela, la moralité que les Kinois auront tirée de la plupart des mesures récemment édictées par les autorités du pays, notamment le Président de la république, pour éviter la propagation à la vitesse G, de la pandémie de coronavirus en RD Congo.
En ce qui concerne le secteur du transport en commun, par exemple, des instructions sans équivoque ont été données sur le nombre de passagers à embarquer en une course. C’est ainsi que, depuis le début de cette semaine, il n’est plus étonnant de trouver dans un taxi, trois passagers seulement, à raison de deux personnes sur la banquette arrière et une devant.
Par ailleurs, les tristement célèbres taxi-bus de marque Mercedes-Benz, communément appelés « 207 » à Kinshasa, très abonnés à la surcharge, ont revu leurs habitudes. Plutôt que de placer quatre passagers sur un banc en plancher rigide et sale, les transporteurs en commun n’y admettent désormais que deux. Les plus cupides y vont parfois jusqu’au maximum trois personnes par banc.
Mais, ce sont des cas rares. Dans les bus, les allées sont dorénavant dégagées. Aucun passager debout. Juste deux personnes assises sur les deux chaises prévues par le fabricant. Il n’y a donc plus un troisième passager coincé entre les deux premiers occupants des chaises.
Les tricycles, très en vogue sur les artères secondaires, dans les quartiers populaires de la ville, se sont sevré de leurs 3ème, 4ème et 5ème passagers. Comme pour dire, ils n’embarquent désormais que deux personnes assises derrière. Bien plus, les deux tabourets de fortune, couverts d’un fin morceau de cuir à l’épaisseur d’une lame de rasoir, placés de part et d’autre de la petite selle du conducteur, ont été carrément démontés. Les mototaxis ne sont pas en reste. Juste un passager à la fois. Pas plus.
Si cette nouvelle réalité observée dans le secteur du transport en commun à Kinshasa est perçue à juste titre comme une contrainte pour se conformer aux mesures sus-évoquées du Président de la république, plus d’un y perçoit la normalisation d’une pratique sociale.
En tout cas, pour une fois, les conditions de transport en commun dans la capitale de la RD Congo se sont quelque peu humanisées. Les Kinois ont retrouvé leur dignité. Les moeurs s’en trouvent désormais préservées.
POURVU QUE CA DURE !
Assez souvent, lorsqu’ils comparent les conditions de transports en commun à Kinshasa avec celles d’autres villes des pays d’Afrique, on entend des Kinois dire, par exemple: « A Brazzaville, à Libreville, à Luanda…ce n’est comme ça! ». En d’autres termes, ils envient les habitudes d’ailleurs, où les gens se déplacent normalement dans le transport en commun, par rapport au comportement « démentiel » des automobilistes Kinois.
Comment peut-on comprendre que, dans une ville comme Kinshasa, des transporteurs en commun, sous prétexte des difficultés de mobilité collective, puissent s’illustrer par un comportement qui soumet leurs passagers à une intimité à la fois forcée et innocente?
On observe, dans des bus et minibus, des passagers tous sexes confondus, debout, collés les uns contre les autres, suant généralement à grosses gouttes sur des trajets abonnés aux bouchons. Dans ces conditions, un scandale produit par des facteurs psycho-somatiques est vite arrivé. Surtout lorsque le parcours est long.
Pire. Sur une moto, on trouve parfois une dame, une fille encastrée entre deux hommes sur la selle, comme s’ils étaient un couple régulier.
D’ores et déjà, la question qui se pose est celle de savoir si, dans d’autres pays, ou plus exactement dans la plupart des villes africaines, il est strictement interdit à un taximan d’embarquer trois passagers à la fois sur la chaise de derrière, pourquoi la même discipline ne saurait-elle pas s’observer à Kinshasa? Pourquoi donc seulement ailleurs et pas ici? Les Kinois n’ont-ils pas droit à la dignité, sous prétexte que le transport en commun est difficile?
Entendu qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire les choses, nombreux sont des Kinois qui souhaitent que ce comportement des transporteurs en commun, qui participe au changement de mentalité – bien que par contrainte – puisse survivre au combat actuel contre la pandémie de coronavirus.
Cela veut dire que l’on devra tuer le vieil homme, même si dans les quartiers populaires de la ville, les clichés ont parfois la peau très dure. Toutefois, avec l’implication sans complaisance des agents de l’ordre, il y a lieu de gagner ce pari. FIXER LE PLAFOND DU VERSEMENT
L’analyse de la situation du transport en commun à Kinshasa oblige une approche holistique. Souvent, quand on en fait le procès, la tendance générale est de déculpabiliser les propriétaires de véhicules. En tout cas, très peu sont des Kinois qui condamnent ceux qui ont investi dans le transport en commun. Pourtant!
Lorsqu’ils sont pris à partie, les chauffeurs de Kinshasa n’ont jamais ménagé leurs patrons. Ils les accusent d’être indirectement à la base de la surcharge dans les bus et taxi-bus. Car, la plupart des chauffeurs disent toujours qu’ils sont obligés d’embarquer plus de passagers, pour espérer réunir le montant du versement journalier, unilatéralement fixé par le patron. Des montants qui oscillent entre 35 et 100 dollars américains, selon qu’il s’agisse d’un taxi, taxi-bus, minibus ou d’un bus.
Ainsi, par rapport à l’idéal de changement de comportement voulu dans ce secteur, l’un des plus importants de la vie sociale, des chauffeurs contactes hier mercredi, demandent au gouvernement de formaliser le plafond du versement.
« Le pouvoir étatique ne doit pas toujours agir en aval ou s’ériger en censeur. Bien au contraire. En tant qu’organisateur de la vie sociale, l’Etat congolais a aussi le pouvoir de fixer les montants que nous, conducteurs, devons remettre à ceux qui nous emploient, en guise de versement journalier.
Depuis quelques années, le secteur de transport en commun à Kinshasa intéresse plusieurs personnes. Le nombre de taxis actuellement dans la ville en est une parfaite illustration. Par conséquent, le chauffeur se voit obligé de fournir beaucoup defforts, parfois au prix du sacrifice, pour réunir le montant fixé par son patron », explique à «Forum des As», un jeune taximan à la tête rasée, et à la barbe longue, au volant droit d’une petite voiture d’occasion, à boite de vitesse automatique, importée d’Asie.
Tout bien considérée, la proposition de ce conducteur semble être une piste à explorer, si l’on veut vraiment remettre de l’ordre dans le secteur du transport en commun à Kinshasa. Sinon, chasser le naturel, il revient au galop.
Forumdesas.org/acturdc.com