Le Katanga en question : Félix Tshisekedi devrait s’inspirer de Charles de Gaulle

Moïse Tshombe entre 1960 et 1962 sous la 1ère République, Nathanaël Mbumba en 1997 et en 1978 sous la 2ème République avec les deux guerres du Shaba, Jean Nguz et Gabriel Kyungu entre 1991 et 1993 sous la première phase de la Transition, Gédéon Kyungu et Daniel Ngoyi Mulunda ces temps derniers : en 61 ans bientôt d’Indépendance, l’ex-Congo belge subit fréquemment des soubresauts de l’esprit indépendantiste katangais. Généralement, la communauté nationale à en faire les frais est celle du Grand Kasaï, particulièrement les Baluba. Que faire pour conjurer le sort ?

Juste une supposition sinon une déduction : ce n’est pas parce que Gabriel Kyungu d’aujourd’hui s’affiche *pro-Fatshi* qu’il s’opposerait au fédéralisme, et surtout à l’autodétermination du Katanga si pareil schéma venait à se produire.

On peut d’ailleurs l’affirmer sans hésitation : l’esprit Katanga vit en lui exactement comme l’esprit Kongo en Zacharie Badiengila, Ne Muanda Nsemi, fédéraliste, confédéraliste, indépendantiste et royaliste. Il choisira forcement son Katanga.

Il ne sert alors à rien à s’en voiler la face : ils sont de moins en moins rares, les Katangais de la trempe de Jason Sendwe, Laurent-Désiré Kabila et Joseph Kabila à penser, à croire et à vivre Congo.

Par contre, ils sont de plus en plus nombreux, les Katangais à considérer le moment venu pour eux de voir leur Katanga au mieux un Etat *fédéral*, au pire (pour les nationalistes) un Etat indépendant.

Bien entendu, c’est au Pouvoir central domicilié à Kinshasa de prendre des dispositions conséquentes. Pas la solution militaire, encore moins judiciaire. Mais la solution politique.

Aucune excuse de pratiquer la politique de l’autruche

En mai 2020, Mgr Dieudonné Uringi, évêque du diocèse catholique de Bunia, a eu le courage de  tirer la sonnette d’alarme sur les risques de balkanisation de la RDC. «J’étais en Allemagne, on m’a montré une carte, j’ai découvert que la RDC est déjà divisée en 4», a-t-il déclaré.

Avant lui, à une délégation de la Société civile du Kivu en séjour également en Allemagne (siège d’Africom), le même type d’initiative avait été proposé.

Déjà, avant la guerre de l’Afdl en octobre 1996, le schéma de balkanisation du Zaïre avait été rendu public. Il préconisait le rattachement des provinces du Grand Kivu et de l’Ituri au Burundi, au Rwanda et à l’Ouganda sous prétexte de les rendre fiables et viables.

On n’a maintenant aucune excuse de pratiquer la politique de l’autruche : tôt ou tard, et d’une manière ou d’une autre, le Katanga ou une autre province finira par franchir le Rubicon, et ce sera trop tard s’il y a improvisation ou précipitation dans la réponse.

Aussi, le défi katangais, pris sous n’importe quelle forme – même celui du ‘’chantage’’ – doit être relevé par Kinshasa, siège des institutions de la République. Car, partant du principe, même non écrit, selon lequel « qui finance commande », il sera difficile pour tout Pouvoir national d’échapper à la pression katangaise considérée comme légitime par la majorité silencieuse katangaise à défaut d’être légale. Le Katanga se targue de financer à plus de 50 % le budget de la République. C’est une vérité à admettre.

Lorsque le Pouvoir est incarné aujourd’hui par Félix Tshisekedi – ressortissant du Grand Kasaï, entité politico-administrative dont les communautés sont souvent en conflit avec celles du Grand Katanga – les choses ne peuvent que se corser. D’où l’impératif d’éviter toutes ces réactions épidermiques émanant des « élites » qui en rajoutent à la confusion là où on a grandement besoin d’éclaircie, de lucidité.

Moralité : qu’on le veuille ou pas, le Katanga obtiendra ce qu’il cherche depuis bientôt 61 ans : à défaut du fédéralisme, il versera dans l’autodétermination.

La sagesse du Pouvoir central devra consister à préparer chacune des 6 provinces héritées de la colonisation ou des 9 ou 11 provinces créées par le maréchal sous le Mpr,  Parti-Etat,  à faire face à cette réalité en démontrant que la pauvreté n’est pas une fatalité.

En prendre conscience devient d’ailleurs une force.

Il est établi que chacune de ces provinces d’avant décentralisation de 2015 est dotée des ressources humaines (têtes et bras) capables de transformer en richesses les ressources naturelles locales. L’exemple du Kivu est édifiant. Connue pour ses activités agroalimentaires intenses, le Grand Kivu  détenait dans son sous-sol un minerai inconnu du grand public : le coltan !

Que personne ne vienne (nous) dire que l’Equateur n’a que du bois, le Grand Kasaï n’a que du diamant, le Grand Bandundu n’a que de chenilles ou Kinshasa n’a pour seule richesse que le ndombolo !

Le malheur de la Constitution du 16 février 2006, tout le monde le sait, est de n’avoir pas défini de façon claire et concrète la ‘’forme’’ de l’Etat pendant que les attributs du fédéralisme y sont fixés. Dont, on s’en doute, la retenue à la source des 40 % des recettes budgétaires.

Que faire dans ce cas ?

Félix Tshisekedi pourrait devenir, s’il le veut, le Charles de Gaulle du Congo en lançant le fameux “Je vous ai compris” non pour l’indépendance des provinces, mais pour le fédéralisme.

Dans bon nombre de pays du monde existe des « Katanga » : la France à la Corse,  l’Espagne la Catalogne, la Belgique la Flandre, l’Italie la Lombardie, l’Algérie la Kabylie et même le Canada a le Québec…

Dans sa vision pour l’Union sacrée de la nation, il pourrait obtenir d’une conférence convoquée à cet effet la définition de la forme de l’Etat.

En attendant, malheur aux provinces qui croient leur survie totalement tributaire des autres. Une telle dépendance est contreproductive pour leurs populations réduites à attendre tout de l’Etat-Providence. Bravo par contre à celles qui prennent conscience de leur « pauvreté » et se résolvent à en faire une force.

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